• Auteur : Hugues Goyé
  • Date : 1er août 2004 (3 septembre 2004)

De l’avenir du libre dans l’Éducation nationale...

Pour ne pas partir en vacances l’esprit (un peu trop) tranquille, voici un article qui aurait pu s’appeler le blues du PR. Où quand l’Education Nationale ne semble pas avoir conscience de tout le potentiel qui sommeille en son sein, potentiel qui lui permettrait sans doute d’adopter plus massivement l’option du logiciel libre.
Le texte n’a pas la prétention de décrire une réalité nationale, simplement d’exposer l’expérience de l’un de ses membres.

Fin de l’année scolaire, vacances et repos bien mérités pour tout le monde. C’est aussi pour moi le moment de revenir sur quelques points concernant l’Éducation Nationale.

Cette vieille institution, trop souvent brocardée, lorgne déjà depuis pas mal d’années sur le libre. Audacieuse initiative qui a donné naissance à un conseil des TICE dans chaque établissement. Ce conseil est composé d’une personne ressources - ils sont appelés PR - et des professeurs représentant chaque discipline.

Nous allons donc nous intéresser au PR qui est bien souvent un professeur mais pas toujours. Il doit s’occuper de l’informatique dans un cadre théoriquement pédagogique. Je dis théoriquement, parce que dans la pratique les PR sont souvent relégués à un rôle moins noble, comme celui qui consiste à dépanner les ordinateurs ou changer les cartouches d’encre des imprimantes. Le PR est encadré par un relais assistance qui lui-même est soumis aux décisions académiques. Cette architecture est celle de l’académie de Rouen et diffère peut-être dans les autres. Je ne vais pas m’étendre sur les détails, vous pouvez ici en savoir plus sur l’organigramme de l’académie de Rouen .

Moi-même ancien PR [1], ardent défenseur de Spip, j’ai constaté que l’Éducation Nationale possédait un énorme vivier composé de personnes de bonne volonté, rompues à l’utilisation des logiciels libres. Certaines sont mêmes expertes et pourraient faire pâlir les développeurs des meilleurs SSII. Il existe des quantités d’applications développées çà et là, et je pourrais par exemple saluer le travail exemplaire du CRDP de Caen, qui a développé l’ambitieux projet baptisé LCS, un serveur de communication adapté principalement aux établissements scolaires. LCS n’est qu’un aperçu parmi d’autres et je laisse le soin aux lecteurs d’ajouter d’autres exemples dans le forum.

À ce niveau de compétences, on pourrait penser que l’institution possède suffisamment d’atouts pour opérer une transition vers le tout logiciel libre et voler de ses propres ailes [2]. Ce n’est malheureusement pas le cas et la lecture de certains mails envoyés sur la liste de diffusion TICE de l’académie de Rouen traduit bien un malaise. Les PR sont de plus en plus dégoûtés, écœurés, et ne se sentent pas soutenus par une administration qui rechigne à saluer leurs travaux.

L’Éducation Nationale semble souffrir des mêmes maux que d’autres administrations voire d’entreprises : la dualité entre les utilisateurs de logiciels sous licence et ceux qui testent le libre. Que dire d’un inspecteur qui suggère d’acheter la suite bureautique Microsoft et d’utiliser Microsoft PowerPoint pour les présentations ?

  • N’a-t-il jamais entendu parler d’Open Office ?
  • Pourquoi un telle incohérence de discours ?
  • Les différentes strates de l’Institution sont-elles hermétiques au point que l’information ne passe pas ?
  • Pourquoi faire des économies d’un côté pour se vautrer dans un gaspillage de l’autre ?

Je ne pourrais malheureusement pas lister tous les griefs [3] de PR mais sachez qu’ils sont nombreux. Leur marge de manœuvre est souvent étroite, pris en tenaille entre une volonté novatrice qui les pousse à oser le libre et la solution de facilité qui consiste à payer des licences sans trop se demander si elles en valent la peine.

Un beau désordre en somme et qui en certains aspects pourrait nous amuser, mais il mine le moral des PR dont certains n’ont pas voulu continuer l’expérience - réaction en chaîne de démissions sur l’académie de Rouen - l’année scolaire 2004 - 2005 commence bien ! Et que dire de l’utilisateur final, à savoir l’élève ?

Je pourrais me faire l’avocat du diable et dire qu’analyser cette problématique sur du long terme aboutirait à une conclusion plutôt positive, peut être que la mise en route est laborieuse et que l’avenir nous réservera de bonnes surprises ? Je me permets cependant d’apporter une dose de scepticisme dans la mesure où l’éducation ne semble plus être une priorité politique.

Affaire à suivre ...

[1] Collège de Pacy sur Eure, Académie de Rouen, année 2002-2003

[2] Notez que le GEP - application servant à la gestion des élèves - tourne encore sous DOS, il semble que des chantiers soient mis en place pour un portage vers des technologies web - je n’ai pas plus d’infos sur ce sujet -.

[3] Et je n’insiste pas sur ce que me rappelait un lecteur sur le forum interne, à savoir « la charge de travail et la rémunération ridicule perçue pour le réaliser »

Commentaires

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aidez moi svp , le 13 septembre 2004 par paco (0 rép.)

salut je suis sénégalais de 22ans et je dois venir m’inscrireà l’université de La Réunion à la prochaine ouverture des classes mais malheureusement je ne connais personne là bas. je recherche ainsi un tuteur qui pourra m’acceuillir et j’accepte toutes les conditions possibles. Aidez moi svp car mon avenir y est.

J’attend votre message avec impatience et je compte beaucoup sur vous.

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> Développement Cellule informatique (île de la Réunion) , le 11 août 2004 (3 rép.)

Bonjour,

Je confirme qu’il y a bien des développements de logiciels réalisés à lîle de la Réunion par des enseignants et de plus commercialisés :
- Le logiciel Le petit Chimiste aurait été développé à la Cellule Informatique TICE du rectorat par 2 enseignants et un inspecteur. Ce logiciel est commercialisé sous licence RIP.

Est-ce normal ? C’est pas du libre en tout cas ...

A bientot

> Développement Cellule informatique (île de la Réunion) , le 12 août 2004

Monsieur,

Ceci est rigoureusement interdit de travailler dans l’éducation nationale et de commercialiser des logiciels alors que l’on travaille déjà dans ce cadre ! Personne n’a le droit de vendre ses propres cours ! Ici, c’est pareil !

C’est inadmissible !

Richard

> Développement Cellule informatique (île de la Réunion) , le 21 août 2004

Salut

Richard a écrit : "personne n’a le droit de vendre ses propres cours" Bien sur que si ! Les cours sont une propriété intellectuelle, soumises aux règles des droits d’auteur. Tu ne peux pas vendre ce que tu as fait avec le matériel de l’EN, mais si c’est avec du matos privé, tout t’appartient. Pour ma part j’utilise des séquences de cours (créations propres avec des logiciels libres) sur poste info, ces séquences n’appartiennent en aucun cas à l’éducation nationale. J’en suis l’unique propriétaire et j’en fait ce que je veux.

> Développement Cellule informatique (île de la Réunion) , le 2 août 2005 par Warthog

Monsieur,

Ceci est rigoureusement interdit de travailler dans l’éducation nationale et de commercialiser des logiciels alors que l’on travaille déjà dans ce cadre ! Personne n’a le droit de vendre ses propres cours ! Ici, c’est pareil !

C’est inadmissible !

Richard

Je pense que ce qui est inadmissible c’est d’entraver la libre diffusion du savoir. Que font les profs dans les universités qui publient un bouquin qui reprennent l’intégralité de leurs cours... Si les créateurs de ce logiciels l’ont fait seuls il n’y a pas de raisons de les interdire de revendre ce logiciel chacun est libre...

Je ne connaissait pas l’existance des TICE c’est intérressant. Encore un potentiel gaché par la bêtise. Je pense que toute les structures innovantes ne se heurtent qu’à un seul ennemi : l’administration. Lorsque j’était en fac d’histoire à Lyon2, j’ai participé à plusieurs projets informatiques et les problèmes insurmontables venaient toujours de l’administration. Courage aux gens motivés qui se battent pour une école meilleure ils sont trop peu nombreux par rapport à ceux qui s’en foutent. Courage les gars.

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> Ile de la Réunion c’est pire ... De l’avenir du libre dans l’Education Nationale... , le 11 août 2004 (1 rép.)

Bonjour,

A l’île de la Réunion c’est - à mes yeux - pire ! J’ai travaillé au niveau académique, je me suis investi afin de proposer une solution en auto-install (après avoir testé SLIS). On réunissait les correspondants TICE, je leur proposais ma solution (3 ans de travail avec des Weekend entiers) ...

MAIS, je dérange les anciens qui ne font rien : http://www3.ac-reunion.fr/ était un serveur RedHat 7.3 avec du contenu, maintenant rien qu’un mauvais compteur qui s’actualise à chaque actualisation de page par le navigateur.

Le projet que j’avais (pédagogique) plus rien ! Poubelle, ils ont pris un tout jeune qui ne connaissait rien pour faire croire à la continuité de mon travail. Mais en réalité, comme il a tout a apprendre, il repart de zéro ...

J’AI ETE VICTIME DE HARCELLEMENT PSYCHOLOGIQUE ET DE MISE A L’ECART.

Je ne travaille plus à la DSI (cellule info) ... Les autres on enterré le projet dès mon départ.

Comment être prof et commuler : 3 à 4 HSA, ne plus avoir d’élèves, ne plus avoir un chef sur le dos, glander, toucher la prime de conseils de classe, avoir les mêmes vacances qu’avant => île de la Réunion cellule informatique TICE !

> Ile de la Réunion c’est pire ... De l’avenir du libre dans l’Education Nationale... , le 13 août 2004 par Sebastien

Je ne travaille plus à la DSI (cellule info) ... Les autres on enterré le projet dès mon départ.

J’aimerais pouvoir dire que cela est en train de changer, mais j’aurais l’impression d’être soit de mauvaise foi, soit en train de vendre la peau de l’ours...

Cela dit, le Gral existe, il a pris beaucoup de forces, notamment cette année, et il devrait faire parler du libre dans l’Éducation nationale dans les mois à venir...

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Avenir du libre EN : les intendants en premiere ligne ! , le 5 août 2004 par Etienne (0 rép.)

Il y a des gens, dans les etablissements secondaires, qui assurent les achats des etablissements. Concretement, ce sont les premiers a convaincre. Et ce ne sera pas bien difficile dans la plupart des cas !

Des lors, avec un ou des profs (si personne ressource alors c’est encore mieux) plus son gestionnaire, le chef d’etablissement ne peut plus faire la sourde oreille. Et qu’on vienne me parler UNE FOIS d’un inspecteur qui ait le culot de dire "qu’est-ce donc, ce n’est pas du MS, quel scandale".

Il faut les comprendre, ces inspecteurs : ils doivent evaluer le travail des enseignants, ca les emm. totalement d’imaginer que certains utiliseraient un autre outil outil que leurs moutonniers collegues.

Plus dur : imposer OpenOffice.org dans les administrations. Je m’y tente mais autant lutter contre la maree. Parfois je marque des points et je rigole bien... Parce qu’on peut me dire n’importe quoi, OOo marche toujours, et notamment la ou MS Office est bloque pendant des semaines. Mais il faut rappeler que les licences "education" de MS sont valables pour l’enseignement, pas pour l’administration generale des etablissements.

Quelle baraque paie les licences au bon prix (fort) pour ses postes administratifs ?

-----> La solution a tout

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> De l’avenir du libre dans l’Education Nationale... , le 2 août 2004 (0 rép.)

Pas grand chose à ajouter..... Je ne fais pas du tout partie de l’éducation nationale, j’en suis juste utilisateur ( ou plutôt mes enfants). Je suis un bon français moyen qui comme les autres se laisse parfois aller à borcarder les profs.... Mais je suis complètement d’accord sur l’incohérence totale qui règne sur l’informatique dans l’éducation. Il existe d’excellents logiciels libres qui couvent sans doute la totalité des desiderata pédagogique, ils y a des PR plus que volontaires pour les utiliser ..... les académies et le ministère découragent les bonnes volontés en imposant des solutions coûteuses rejetées ( à juste titre) par les PR censés les mettre en place ... Il y a vraiment des moments ou on marche sur la tête... Si le côté "libre" et "communauté" de ces logiciels ne plait pas aux décideurs .... au moins le côté "GRATUIT" devrait les convaincre... D’autant plus que cela permet aux élèves qui ont un ordinateur perso de s’équiper des mêmes logiciels gratuitement et légalement plutôt que de pirater les logiciels de type Microsoft Office ( malgré les licences ’Education’ j’ai du mal à croire que de nombreux élèves/ étudiants achètent la suite Office de Microsoft ...).

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